الأربعاء، 18 أبريل 2012

Gabriel seul face au monde


Halfdan W Freihow articlephoto
"Sur les rives atlantiques balayées par les vents d’une terre lointaine de Norvège, un enfant regarde la mer. Un père regarde l’enfant. Ce père, c’est Halfdan W. Freihow, l’auteur d’une lettre à son fils Gabriel, atteint d’autisme infantile. « L’autisme est [entre autres] l’incapacité d’imaginer que soi-même et une ou plusieurs autres personnes parlent de la même chose. C’est pourquoi une grande partie du monde social est vécue comme imprévisible, et donc effrayante. » Grand absent, pourtant si présent, Gabriel croit aux rois, aux princesses, aux châteaux. Il sait s’émerveiller et, au même instant, saboter sa joie en bloquant sur un mot. Frustré, car sans réponse quand il demande « pourquoi il ne fait pas assez chaud pour prendre un bain de soleil au printemps », il est, pour son père, une terre inconnue.
Il ne manque pas d’humour, il a l’intelligence : quelle est alors cette ombre qui l’emporte souvent d’un seul coup, loin de tous, à l’abri de ses peurs, ou peut-être en plein dedans ? Distrait, on ne peut pas l’attraper, et c’est précisément cette altérité qui le rend exemplaire. Dans l’admiration du père, il y a une fascination pour l’homme libre que l’enfant est en train de devenir. La famille a su transformer en jolis souvenirs le lot d’incidents où l’enfant a mal agi, même s’il a fait bien rire, à bord d’un avion, par exemple, vomissant à dessein sur une femme en manteau de fourrure. Le père et la mère sont restés solides, capables de bâtir ce « mur » contre lequel Gabriel doit pouvoir s’appuyer, lui qui se sent sans cesse incompris. Grâce à la présence de ses proches, il ne développe pas de violence extrême. Il rit des blagues parce que ça se fait, mais les mots pour lui ne sont pas rigolos, car ce sont bien eux qui le séparent tant des autres. Alors, il fugue parfois, quand le monde, insoutenable, ne comprend pas ce qu’il a voulu dire.
Seuls la logique ou le rituel soulagent un instant Gabriel. Manger des spaghettis le soir, si on lui a promis un steak le matin, le rend noir de colère, même s’il préfère les pâtes. Et si on les recense, combien y a-t-il vraiment d’appuis logiques au monde ? La quête de ce père touche au cœur dans cet ouvrage qui ne fait étalage de rien, mais raconte, entre souvenirs et avenir, ce que Gabriel connaît de la vie, c’est-à-dire ni le calcul ni la stratégie. Est-ce le portrait de l’enfant ou bien celui de lui-même que l’auteur livre là ? Il en ressort cette fierté du père pour la pureté de son fils. « Le paysage ici est grand comme le langage », lui écrit-il, évoquant pourquoi la vie sur leurs terres de Norvège ne peut se passer ailleurs, car on s’y creuse une place « avec respect et patience », exactement comme celle que le père s’est forgée à côté de l’enfant.
Gabriel n’est pas seulement ce jumeau du paysage, il est aussi une voix, une musique, une langue. Il est un être à contenir, « tellement ouvert et exposé qu’il est inébranlable et impénétrable ».
« Cher Gabriel », d’Halfdan W. Freihow, éd. Gaïa, 165 pages, 16,30 euros."

(Via .)

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